En 2021, le Sommet virtuel du climat a calculé que, s’il avait eu lieu en présentiel, son empreinte carbone aurait été près de 12 fois supérieure : 54,3 tonnes d’équivalent CO2 pour l’événement fictif en présentiel contre 4,6 tonnes d’équivalent CO2 émis par le sommet digitalisé. Est-ce déjà la fin du match ? La solution sera-t-elle donc aussi simple : la digitalisation version 2020 serait LA solution pour sauver le climat et les Hommes ? De toute évidence non, et ceci pour plusieurs raisons.
L’événement digital ne répond plus aux objectifs de rencontre
Les événements 100 % digitaux, soyons clairs, ça ne fonctionne pas souvent ! Un événement en format exclusivement digital ne répond pas aux objectifs de la rencontre IRL (in real life) : on ne fait pas de rencontre de qualité derrière son écran et l’impact sur notre mémoire est quasi nul. Et puis, avant tout, est-ce vraiment ce que nous voulons comme lien social dans nos sociétés ?
Depuis 2022, adieu donc au copié-collé de l’événement présentiel sur écran. On constate aujourd’hui l’avènement de l’événement hybride, avec un nouveau type de digitalisation. C’est le grand retour du présentiel… en version augmentée ! Et c’est bien là que se joue le match.
Avoir une dimension digitale, qui n’existait pas il y a encore quelques années, n’est-il pas finalement un ennemi de notre combat à tous vers la sobriété et l’atténuation du changement climatique?
Tentons d’objectiver la question puisque, de plus en plus d’organisateurs de salons et d’événements corporate, avancent dans cette direction.
L’hybridation événementielle selon Decathlon
En octobre prochain, Decathlon organisera Reveal Innovation, son « digital show » dédié à l’innovation. A cette occasion sont révélées, en avant-première, les futures innovations de la marque. 400 personnes participeront au live, qui sera diffusé internationalement dans les 60 pays où Decathlon est présent ainsi que sur l’ensemble des sites de conception. En plus de l’événement streamé depuis Lille, plus d’une centaine d’événements locaux seront organisés pour permettre la retransmission de l’émission à travers le monde.
On pourra y vivre une expérience digitale, découvrir les produits en 3D, 16 contenus présentant chaque innovation, ainsi que des contenus thématiques inspirants. Une importante communication via les réseaux sociaux sera déployée en amont, le public pourra voter en direct pour ses produits préférés. Un replay sera disponible pour revivre l’événement.
Lors de l’édition 2022, 30 000 personnes ont été en contact avec l’événement via le streaming, le replay, un showroom digital et les événements locaux organisés dans 40 pays, tout en évitant les déplacements internationaux. C’est ce qu’on appelle un événement en grappe. Résultat des courses : L’événement « augmenté » hybride, phygital a fait émerger de nouveaux besoins et laisser apparaitre de nouvelles causes d’ émissions carbone que ce soit par la communication média amont, l’investissement humain renforcé ainsi que les moyens techniques déployés (régie, streaming, duplex, stockage des données pour la rediffusion…) Match retour ?
La digitalisation version 2023 serait donc tout aussi nuisible pour l’empreinte carbone de la filière ? Nous voyons dans l’exemple de Decathlon que la vérité est entre les deux, comme souvent.
Mesurer pour contenir, voire réduire son empreinte carbone, dans tous les cas
Quand la digitalisation sert aussi à l’hybridation d’un format, en permettant la genèse d’événements en grappe, qui évitent les longs déplacements, mais qui conservent la rencontre, on arrive, au moins, à un jeu à somme nulle, voire souvent positive en termes de réduction de l’empreinte carbone, compte tenu, entre autres, de la réduction des transferts internationaux.
Attention néanmoins à ne pas oublier que la responsabilisation de notre filière devra nécessairement prendre en compte la maitrise des nouveaux postes d’émissions.
Decathlon l’a bien compris et va mesurer son empreinte carbone* pour la contenir, voire la réduire sur les prochaines éditions. Messieurs, Mesdames, organisateurs, prestataires, acteurs de la filière de la rencontre, c’est en se mesurant et s’améliorant que nous assurerons la survie de ce qui fait la raison d’être de notre écosystème: créer la rencontre.
*Calculs réalisés à partir du module « scénarios » de la plateforme Climeet, dédiée au calcul et au pilotage de l’empreinte carbone des événements (www.climeet.events)
Article publié dans le numéro du Guide de Juin 2023 – Première partie du dossier « Eco-responsabilité». Propos recueillis par Béatrice Eastham.