EXPOFRANCE 2025, association déclarée d’intérêt général, prépare la candidature de la France à l’organisation d’une exposition universelle en France en 2025. Jean-Christophe Fromantin, député-maire de Neuilly, à l’initiative du projet, en est le président. C’est son directeur général, Ghislain Gomart, qui nous guide depuis plusieurs entretiens.
Dans sa recherche de partenaires, ce dernier insiste sur 4 points : la nécessité pour la France de se donner de nouveaux horizons, l’exposition universelle comme catalyseur des innovations et des savoir-faire français et mondiaux, la mobilisation de tous les territoires et secteurs d’activité, et enfin la mobilisation nationale dans un immense projet durant les 7 années de préparation (2018-2025).
Après la genèse du projet, l’originalité du concept, les étapes de la candidature, les soutiens et partenaires… c’est de communication qu’il nous parle aujourd’hui.
Propos recueillis par Eric Watiez pour la Gazette des Salons
EW. Vous nous avez abondamment parlé de soutiens politiques, de partenaires économiques, de travail estudiantin… Et le grand public dans tout ça ?
GG. Les soutiens que vous avez évoqués sont des caisses de résonances qui touchent toutes les parties prenantes de la société. Progressivement l’impact va augmenter.
Plus les corps intermédiaires seront mobilisés et sensibilisés, plus nous aurons d’impact sur le grand public. Nous avons d’ailleurs ouvert un comité de soutien pour le grand public avec 3 porte paroles qui apportent chacun une image particulière au projet, une image rationnelle et scientifique avec Cédric Villani, grand mathématicien, directeur de l’Institut Henri Poincaré et personnalité originale, une image artistique avec Anne-Sophie Pic, la seule femme chef 3 étoiles au guide Michelin, soucieuse d’échanges et de partage de talents, et enfin le sens du défi et de l’audace porté par Maud Fontenoy avec laquelle « rien n’est impossible ».
Plus de 3.000 personnes apportent aujourd’hui leur soutien sur le site Internet, 9.000 amis sur Facebook et près de 7.000 followers sur Twitter. Mais ce n’est là que le tout début de la mobilisation du grand public.
EW. Sur quoi vous basez-vous pour affiner vos outils de communication ?
GG. Ce n’est réellement qu’à partir de 2015 que nous entamerons nos actions de communication à destination du grand public. L’idée est de préparer une exposition itinérante sur les expositions, avec des outils de communication mobilisant tous les partenaires.
Le terreau est au demeurant très favorable. Le résultat d’un sondage IFOP réalisé très récemment montre que 84% des français sont favorables ou très favorables à la candidature de la France à l’accueil de l’exposition universelle de 2025, à la fois pour satisfaire leurs besoin de rêve, mais également comme un support très rationnel. A la question du choix entre l’organisation des JO ou d’une exposition universelle, c’est cette dernière qui l’emporte largement : 36% contre 18%, 33% étant favorables aux deux événements et 3% seulement à aucun des deux. C’est notamment l’impact économique favorable des expositions universelles qui est mis en exergue par les sondés.
Pour obtenir l’adhésion large du public, il nous faudra le convaincre que le projet est excellent pour remédier à la sinistrose ambiante et au sentiment de déclin qui pèse sur notre population. Pour cela nous devons montrer que nous mettons en place un projet fédérateur apte à faire tomber les barrières, à rassembler, à offrir à chacun des opportunités d’engagement. Ensuite, il faudra souligner combien ce projet a vocation à s’autofinancer sans argent public, sans appel au contribuable. Nous montrerons qu’il y aura des retours sur investissement en termes d’économie, d’emplois, d’image de la France, d’impact positif durable sur le patrimoine, sur l’architecture, etc. Enfin, notre projet, vous l’avez compris, n’est pas uniquement parisien, mais vise l’attractivité de tous les territoires.
EW. Le succès d’une exposition universelle se mesure au nombre de visiteurs. Comment, avec l’esprit territorial ouvert que vous semblez souhaiter aujourd’hui mettre en place, pensez-vous réaliser le comptage ?
GG. Cela reste évidemment à affiner, mais nous imaginons la réalisation d’un pass pour entrer dans les sites. Il est étonnant de réaliser qu’en 1878, les gens achetaient à la poste ou à la gare un billet de train pour aller à la capitale voir l’exposition ; ce billet de train incluait l’entrée à l’exposition. Il y a 130 ans, cette idée de « package » existait déjà. C’est quelque chose que nous allons refaire avec les techniques dont nous disposons aujourd’hui, les enregistrements sur smartphone par exemple, tout reste à imaginer et nul doute que des entreprises partenaires du secteur de l’information et de la sécurité contribueront à trouver les meilleurs moyens d’enregistrement et d’accès.
EW. Avez-vous établi une prospective du nombre de visiteurs sur l’exposition 2025 ?
GG. L’évolution de la fréquentation sur les expositions françaises est symptomatique. En 1855, 5 millions de personnes visitent l’exposition universelle. 11 millions en 1867, puis 20 millions en 1878, 32 millions en 1889, date de la Tour Eiffel, 51 millions en 1900, date à laquelle la France compte 40 millions d’habitants. Ceci donne une idée de l’ampleur grandissante du mouvement créé.
La dernière exposition universelle à Shanghaï en 2010, la plus grosse avec 242 pavillons et 189 pays représentés a accueilli 73 millions de visiteurs. Ainsi, les 51 millions de visiteurs à Paris en 1900 ont constitué une fréquentation incroyable et inégalée.
1900 est un grand tournant pour la France et Paris en particulier avec de grandes traces architecturales : le pont Alexandre III, les Grand et Petit Palais, la gare des Invalides, la gare d’Orléans, aujourd’hui musée d’Orsay, la gare St Lazare et la gare de Lyon… Phénoménale Expo 1900 !
Les italiens, pour la prochaine exposition à Milan en 2015 ont prévu environ 25 millions de visiteurs, Dubaï en 2020 avait également annoncé 25 millions de visiteurs lors de sa candidature, mais semble envisager bien davantage aujourd’hui. Ces fréquentations peuvent paraître peu ambitieuses au regard des chiffres évoqués précédemment ; cela s’explique par le fait qu’il n’y a pas une richesse patrimoniale, architecturale, muséographique ou paysagère si importante pouvant susciter un engouement au-delà de l’exposition, au contraire de Paris et de la France bien entendu.
Aujourd’hui, Paris est visité par 30 millions de personnes chaque année, dont 16 millions d’étrangers. Ces dernières années, la France a accueilli annuellement 82 à 83 millions de personnes. Avant d’affiner nos chiffres, nous pouvons prétendre accueillir, durant les 6 mois que durerait l’exposition universelle, au moins autant de visiteurs qu’en 1900, soit plus de 50 millions. Peut-être bien davantage.
Cela permet, sur 6 mois, d’élaborer un modèle économique parfaitement rentable.
EW. Dans la mesure où vous communiquez beaucoup sur le projet, comment protégez-vous votre propriété intellectuelle ?
GG : Nous ne cherchons pas à limiter notre parole. Nous avons par essence des avantages ou différences que d’autres n’ont pas. Ainsi Paris n’a pas d’équivalent au monde, même s’il existe d’autres très belles villes, nos territoires et leurs diversités ne se retrouvent pas ailleurs, même s’il s’en trouve d’autres très beaux dans d’autres pays, notre projet en étoile autour du Grand Paris, avec les plus grandes villes atteignables en moins de 2 heures, n’est probablement pas duplicable ailleurs.
Notre idée de s’appuyer sur notre richesse patrimoniale et des sites existants et éprouvés depuis leur création à des fins d’expositions universelles est pour nous la bonne idée qui n’est pas transposable telle quelle à l’étranger.
EW. Pour conclure, quelles sont les perspectives de gagner ?
GG. Nous avons d’énormes chances de gagner notre défi en 2025. Nous y croyons dur comme fer. Au-delà de notre propre conviction, je vois se dessiner concrètement une grande émulation. Prenez la métaphore de la boule de neige qui roule et qui, au fur et à mesure de son mouvement, offre une plus grande surface de captation et agglomère toujours davantage de matière. Aujourd’hui, de plus en plus de gens nous appellent, se mobilisent, s’associent, nous interrogent pour savoir comment ils peuvent s’associer au projet, sollicitent des rencontres…
Nombreux et extrêmement divers sont ceux qui nous font explicitement part de leur envie de voir ce projet aboutir : organisations patronales et professionnelles, fédérations sportives, instances touristiques comme Atout France ou événementielles comme UNIMEV, entreprises grandes et petites, étudiants, collectivités territoriales dans toute la France, etc.
Un grand enthousiasme se met en place, au-delà de ce que nous imaginions au démarrage de notre action.
EW. Il n’y a donc aucune raison de ne pas gagner ?
GG. La France a des atouts incontestables, qu’elle ignore d’ailleurs parfois, elle garde une image de marque forte dans le monde, malgré aussi ses défauts. De plus, il y a plus de 75 ans que la France n’a pas organisé d’exposition universelle. Ensuite Paris est la ville la plus visitée du monde. Enfin, la France est le pays le plus visité du monde.
Si on met tout cela en mouvement, si on se mobilise, si on réinvente un nouveau concept d’exposition universelle, si on apporte de la collaboration et du consensus, il n’y a pas de raison de ne pas gagner.
Comme toujours, il ne faut pas partir gagnant et croire faibles les autres compétiteurs. Mais partant sur nos avantages multiples, c’est plutôt encourageant. Et aujourd’hui, le projet fédère plus qu’il ne dissocie.
EW. Merci monsieur Gomart pour toutes les informations précieuses que vous nous avez apportées au cours de ces entretiens. La Gazette des Salons souhaite sincèrement une issue très favorable au projet que vous portez. Nous suivrons attentivement et relaierons son avancement.