Marc Toutlian, le jeune patron de MT Expos organise une dizaine de salons de l’habitat et de foires, dans un territoire à l’est de la France allant de Beaune à Albertville et Pontarlier. Son profil et son parcours sont assez représentatifs de ces organisateurs futés qui savent récolter bien mieux que des miettes.
Au-delà des grandes structures parisiennes ou régionales qui font l’actualité autour de manifestations bien installées dans le paysage évènementiel, il existe une catégorie d’organisateurs de salons qui tissent discrètement, mais opportunément leur toile dans des territoires négligés par les radars de l’event marketing. En artisans consciencieux, ils comblent utilement le vide laissé en proposant à des agglomérations souvent dépourvues de grands parcs d’expositions, des salons « de proximité ». Des manifestations grand-public qui attirent généralement entre 5 000 et 15 000 visiteurs autour des thématiques chères aux français : l’habitat, la gastronomie, le bien-être sous toutes ses formes. Des petites foires qui créent l’évènement pendant quelques jours dans des villes qui en manquent.
Ces manifestations qui ne feront jamais la une des journaux télévisés représentent un bon quart des 2 000 salons référencés chaque année dans l’agenda de la Gazette des Salons. Sans faire de bruit, elles permettent à de nombreuses PME de se développer localement. Nous avons rencontré Marc Toutlian, le jeune patron de MT Expos, dont le profil et le parcours sont assez représentatifs de ces organisateurs futés qui savent récolter bien mieux que des miettes. MT Expos organise actuellement une dizaine de salons de l’habitat et de foires, dans un territoire à l’est de la France allant de Beaune à Albertville et Pontarlier.
Gazette des Salons : Bonjour Marc, comment en êtes-vous arrivé à organiser des salons ?
Marc Toutlian : Bonjour. Comme beaucoup de gens qui travaillent dans les salons, c’est par un total concours de circonstances que j’ai découvert cet univers. A la fin de mon BTS activité commerciale il y’a déjà plus de 20 ans, ma première mission a porté sur la création d’un salon du livre à Vienne. Ce fut une sorte de déclic et j’ai pris conscience de tout le potentiel de ce secteur des foires et salons. Je me suis alors vraiment retrouvé dans ce domaine d’activité complet qui allie le commercial, le marketing et l’accompagnement client.
Ensuite, je me suis fait la main en organisant des mini salons dans des galeries commerciales sur des thèmes divers, allant des produits asiatiques aux antiquaires, en passant par la gastronomie. Une expérience qui m’a permis d’apprendre mon métier rapidement et « sans filets ». Au bout de quelques temps, j’ai fini par jeter l’éponge, dépité par l’attitude peu encourageante des dirigeants des centres commerciaux. Mon premier « vrai salon » a eu lieu au parc des expositions de Saint Etienne. Il avait pour thème l’habitat, ce qui constituera le fil rouge de mon parcours et il s’est tenu régulièrement pendant 10 ans. Ensuite, j’ai enchainé avec un salon des loisirs créatifs à Marseille.
Gazette des Salons : Finalement, ce parcours ressemble à un grand fleuve tranquille ?
Marc Toutlian : Pas vraiment. J’ai connu les déconvenues que connaissent souvent les jeunes créateurs d’entreprises. A commencer par des déboires avec mon premier associé, synonymes de nouveau départ, en solo cette fois. Le marché évolue, et certains secteurs économiques comme l’habitat souffrent plus que d’autres.
Par conséquence, les salons de l’habitat sont plus compliqués à monter qu’il y’a quelques années. Il n’y a pratiquement plus de produits portés par les crédits d’impôts, sauf en ce qui concerne l’isolation. Il y’a eu des arnaques sur cette manne, et cette clientèle principalement motivée par l’aspect financier s’est perdue. Enfin, il faut reconnaitre que le secteur ameublement et décoration a véritablement souffert de la concurrence avec internet. Il faut alors savoir aller à la rencontre des opportunités pour proposer des formules attractives pour le public et pour les exposants.
Pour communiquer et séduire les visiteurs, nous avons besoin de nouveautés à présenter sur nos salons. Il faut bien reconnaitre qu’à part les panneaux solaires en auto-consommation et les pergolas bio climatiques (toit à lames orientables en fonction du soleil), on recense de moins en moins de vraies nouveautés. Au-delà des bonnes affaires, le public a besoin d’être étonné, de faire des découvertes. C’est donc mon travail d’organisateur que d’inciter sans cesse les exposants à mettre en avant leurs innovations pour récolter les fruits de leur présence.
Gazette des Salons : Pourtant, si vous continuez à développer de nouveaux salons, les aspects positifs doivent bien l’emporter sur les difficultés que vous venez de décrire ?
Marc Toutlian : En effet, et heureusement ! Dans le bâtiment, on a encore besoin de services non délocalisables, d’artisans sérieux et de proximité. Pour cela, dans l’offre de nos salons, nous privilégions les entreprises locales. Cela nous coupe peut-être de grandes enseignes nationales, mais c’est primordial pour le suivi et la crédibilité du salon que de créer une relation durable entre des visiteurs porteurs de projets et des exposants fiables et implantés localement. Cette proximité géographique privilégie également les ventes « après salons ». Par exemple, un vendeur de meubles a « cartonné » sur la foire de Dole et a rentabilisé son investissement dans le temps, grâce aux nombreux contacts pris pendant la foire, et qui sont ensuite passés en magasin.
Gazette des Salons : Vous évoquez la Foire de Dole, que représentent les foires dans votre activité ?
Marc Toutlian : Depuis 2 ans, l’activité se développe essentiellement vers les foires expos. C’est un autre métier, encore plus exigeant. Il faut offrir un format beaucoup plus complet avec des animations qui fédèrent toute la famille, l’ensemble des générations. Les foires se construisent à partir d’une alchimie qui mélange des vendeurs de champagne, de saucisson, des musiciens, un taureau mécanique… autour d’une ambiance bon enfant, synonyme de moment agréable pour toute la famille. Pour maintenir le cap et nous renouveler chaque année en animation, je fais appel à un réseau de prestataires indépendants « chinés » sur d’autres évènements. Faire venir des « stars » est cher et pas forcément productif… Il est très important d’être toujours en veille.
Au chapitre des satisfactions, il y’a la Foire d’Albertville qui a rassemblé 8 500 visiteurs en 2016, et la Foire de Dole qui est passée de 120 à 150 exposants pour sa deuxième édition. Rien ne me met plus en joie qu’un évènement qui progresse et fait le bonheur des visiteurs comme des exposants. J’avoue avoir pratiquement la larme à l’oeil devant une belle affluence. C’est la récompense furtive de plusieurs mois de travail, et cela aide à surmonter les moments difficiles que nous ne maîtrisons pas forcement, tels que la météo, l’actualité, les attentats…
Gazette des Salons : Un sujet fait débat actuellement chez les organisateurs de salons entre les entrées payantes et la gratuité.
Marc Toutlian : En effet, on constate que de plus en plus de foires passent au gratuit. Je n’ai pas de position définitive sur le sujet, tout dépend de l’évènement et de la ville. Les entrées payantes valorisent le salon et permettent une sélection de visiteurs « motivés ». Elles permettent aussi aux exposants d’inviter leurs clients fidèles.
Le visiteur type de nos évènements à la cinquantaine, il a déjà payé sa maison et dispose d’un bon pouvoir d’achat. Investir 3 ou 4 € pour aller à la découverte de produits nouveaux, de bonnes affaires proposées par des exposants sérieux, n’est pas un frein pour lui. Par ailleurs, il est difficile de faire payer l’entrée pour un salon accueillant moins de 60 exposants.
Gazette des Salons : En quelques mots, quelles sont les clés du succès pour une foire ou un salon ?
Marc Toutlian : Tout d’abord, être à l’écoute de TOUS les exposants. Chacun détient une part de vérité qu’il est important de prendre en compte.
C’est cette relation de proximité qui permet de fidéliser les exposants, de les convaincre de nous suivre dans de nouveaux salons.
En ce qui concerne les visiteurs, il n’y a pas de mystère : pour les séduire, en plus d’une offre et d’animations attractives, il faut mettre le paquet sur la promotion. Nos budgets de communication, autour de 60 000 € par évènement, sont conséquents, ce qui nous permet de faire des affiches 4×3, de la radio, de la distribution de flyers. C’est le prix à payer pour que l’affluence soit au rendez-vous et que tous les exposants travaillent !
Propos recueillis par Hervé Boussange. Cet article a été publié dans le Guide des Salons de janvier 2017.