Le premier ministre Edouard Philippe, vient d’annoncer le retrait de la candidature de la France à l’Exposition Universelle 2025 (ExpoFrance). Cette candidature, préparée depuis 7 ans, et officiellement déposée en septembre dernier (signature d’Emmanuel Macron) devait être validée par le Bureau International des Expositions à l’automne 2018.
Les raisons invoquées par le chef du gouvernement sont la faiblesse économique présumée du projet, la fréquentation aléatoire et le peu d’engagements de partenaires privés.
A contrario, en octobre dernier, Emmanuel Macron, lors d’une intervention sur le site de Paris-Saclay, un des sites postulant à l’accueil de l’Exposition universelle, avait rappelé la pertinence du projet et son engagement dans la candidature, en pointant « le modèle économique original de partenariat public-privé ».
Une annonce surprise après 7 ans d’engagement
La Gazette des Salons a suivi dès l’origine et à plusieurs reprises l’avancée de la candidature, notamment lors d’une longue interview de Ghislain Gomart, le directeur à l’époque du comité d’organisation ExpoFrance. A ces occasions, nous pointions l’originalité du projet en ce qu’il mettait en avant les territoires (pas seulement Paris), un marché très ouvert pour les prestataires de nos métiers et une motivation supplémentaire à aboutir les infrastructures de transport du Grand Paris.
Jean-Christophe Fromantin (maire de Neuilly, député UDI des Hauts-de-Seine jusqu’en 2017), initiateur de la candidature et président d’Expofrance, souhaite, dès l’origine de sa réflexion, un œcuménisme politique autour du projet (Luc Cavournas, député PS du Val-de-Marne, vice-président de la métropole du Grand Paris, réunions d’informations et de débats régulières dans les coulisses de l’Assemblée Nationale) et l’implication du privé nécessaires au soutien, à la réalisation et au succès économique du projet.
De nombreux partenaires s’engagent : Accor Hotels, ADP, Carrefour, AG2R, Crédit Agricole, Bouygues, Engie, Clarins, JCDecaux, Renault, La Poste, Unibail-Rodamco, etc.
Enfin, considéré comme un projet d’avenir, et de place de la France dans le monde de demain, une très large confrontation de projets d’étudiants est mise en place.
Le projet passe logiquement à l’échelon supérieur, l’establishment politique, décideur final, souhaite avoir un regard pointu et responsable. Les trafics d’influences, comme il est d’usage, s’organisent alors même qu’Expofrance obtient le dépôt officiel de la candidature par la présidence de la république et mène les actions d’information et de lobbying auprès des membres du BEI. Des politiques s’engagent, d’autres, comme Anne Hidalgo (qui n’est pas à l’origine du projet), font preuve de défiance après s’être montrés enthousiastes. Des événements, comme la candidature aux JO 2024, brouillent, certainement à tort, les analyses.
L’annonce « surprise » d’Edouard Philippe de renoncer à la candidature à l’Exposition Universelle 2025, suscite, on s’en doute, les commentaires acerbes, sur la forme et sur le fond, de la part des personnes impliquées profondément dans le projet.
Jean-Christophe Fromantin « trouve la méthode d’une lâcheté, d’une déloyauté, d’une indignité par rapport à la fonction de Premier ministre et à la considération qu’il peut avoir vis-à-vis de tous ces gens, qui travaillent depuis sept ans sur l’Exposition universelle ».
Gilles Dufeigneux, ancien délégué général chargé du financement de la candidature, considère les arguments invoqués par Edouard Philippe « injustifiés » et « incompréhensibles ».
Le rendez-vous était historique… mais la France lui a posé un lapin
Le secteur évènementiel représentée par UNIMEV, manifeste quant à lui son incompréhension face à l’abandon de la candidature d’Expo-France 2025, et regrette cette décision qui prive la France et sa filière événementielle d’une opportunité historique d’asseoir le pays comme terre d’accueil de grands événements internationaux.
« Le rendez-vous était historique… mais la France lui a posé un lapin », c’est ainsi que Fabrice Laborde, le président du LEADS exprime sa déception : « Le LEADS, Les Agences Design et Stand, s’associe pleinement à l’UNIMEV pour exprimer sa consternation face à la décision du gouvernement de retirer la candidature française à Expo-France 2025. Ce désistement non seulement prive la France d’une occasion historique d’affirmer au monde son attractivité en matière d’événements à résonance planétaire, mais elle pénalise lourdement la filière française des agences de design & stand que représente le LEADS. Rappelons que ce pan essentiel de la filière événementielle française génère 600 millions d’euros par an et n’occupe pas moins de 10000 collaborateurs. Cet événement aurait été une opportunité unique ouvrant des perspectives bien plus importantes que les JO de 2024, en matière de nouveaux marchés, d’image et bien sûr d’emplois créés. Ce devait être un rendez-vous historique ».
L’annonce de retrait qui vient d’être faite ne peut évidemment pas plaire aux initiateurs, et de façon plus large, aux aspirants de nouveaux modèles économiques impliquant le privé. Les réactions vont continuer dans les prochains jours. D’ores et déjà, sont regrettés la frilosité de l’administration financière « pour un projet innovant, porté par le privé, la société civile et les territoires ». Le prétexte serait également, selon eux, que l’Etat, ne pouvant pas tenir ses engagements de livraison à temps de la ligne 18 du Grand Paris Express, dans le bassin de l’Essonne, centre névralgique projeté des structures de l’Exposition Universelle.
Du fait du retrait de Paris, la ville d’Osaka au Japon semble aujourd’hui tenir la corde pour être la ville organisatrice de l’Exposition Universelle en 2025. Le nombre de journalistes japonais présents à la conférence de presse du renoncement, et leur satisfaction affichée laissent entrevoir à qui va profiter l’annonce du premier ministre… à moins d’autres surprises.
A suivre…
Eric Watiez