Il suffit de se rendre aux abords d’un parc d’expositions parisien qui affiche un salon de renom, pour constater l’envolée qu’a pris en quelques années la revente à la sauvette de cartes d’invitations. Cette pratique ancienne est longtemps restée artisanale et marginale, et il suffisait qu’un képi apparaisse à l’horizon pour que les revendeurs s’éparpillent comme une volée de moineaux.
Hors, depuis 2 ou 3 ans, les revendeurs agissent en bandes organisées, de manière décomplexée, évoluant sans se cacher dans l’enceinte même du parc, voire en faisant preuve d’agressivité vis-à-vis de ceux qui leurs demandent des comptes… Il faut dire que jusque là, pour un revendeur, les chances de se faire arrêter et sanctionner était plutôt minces ; pas suffisamment dissuasives en tout cas pour se priver d’un business juteux.
Un délit pénal pour les revendeurs…
La deuxième loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) a été publiée au Journal Officiel le 14 mars. Parmi ses nombreuses dispositions, elle offre aux forces de l’ordre un dispositif concret pour renforcer la lutte contre la délinquance. La LOPPSI 2 fait désormais de la vente à la sauvette un délit puni de 6 mois de prison et de 3 750 euros d’amende avec confiscation et destruction des produits et moyens liés à l’infraction (art.446-1 du code pénal). La peine encourue est portée à un an de prison et à 15 000 euros d’amende lorsque les faits ont été commis en réunion ou accompagnés de voies de fait ou de menaces. L’objectif de cette nouvelle loi est avant tout de lutter contre le trafic et les réseaux organisés de vendeurs
.… et leurs complices
On peut reprocher beaucoup de choses aux revendeurs, mais rarement de vendre des titres falsifiés. Les billets vendus sont généralement bien réels et conformes. La loi a donc dans sa grande générosité pensé à ceux qui les approvisionnent ou profitent du système. La LOPPSI 2 dote les policiers d’un nouvel outil en créant un délit d’exploitation de la vente à la sauvette. Constitue ce délit le fait d’embaucher, d’entraîner ou de détourner une personne pour qu’elle se livre à la vente à la sauvette en vue d’en tirer profit. L’exploitation de la vente à la sauvette est punie de 3 ans de prison et de 45 000 euros d’amende. De plus, les peines encourues sont portées à 5 ans lorsque ces faits sont commis au préjudice de personnes vulnérables et à 10 ans lorsqu’ils sont commis en bande organisée.
Voila de quoi faire réfléchir ceux qui approvisionneraient les revendeurs en cartes d’invitations pour en tirer bénéfice. Cette pratique a malheureusement été constatée chez quelques exposants : Il est vrai qu’il est très tentant d’écouler les dizaines d’invitations imposées par l’organisateur dans les conditions de participation. Comment résister aux sollicitations de revendeurs insistants pour se débarrasser à bon compte de ces titres d’accès inutilisés… La lourdeur des peines promises par LOPPSI 2 devrait faire réfléchir à deux fois ceux qui avaient pris l’habitude de se faire une petite cagnotte pendant le salon.
La loi ne peut pas tout régler
Même en admettant que cette nouvelle disposition porte ses fruits et mette un frein à l’activité des réseaux de revendeurs, voila qui ne dispense pas les organisateurs de salons de réfléchir sérieusement à une remise en cause du principe qui consiste à inonder les exposants de cartes d’invitations. Comment s’élever contre un fléau quand on l’alimente plus ou moins consciemment ?
Premiers éléments de réponse dans les mois qui viennent aux abords des parcs…
Hervé Boussange